ALVIN John

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John est né dans le Massachusetts le 25 février 1948. Son père est dans l'armée et il passe toute son enfance à se déplacer constamment avec sa famille. Les mécanismes d'adaptation de John pour survivre à l'agitation de cette enfance passagère sont son imagination et son talent artistique. Il utilise ses talents de dessinateur pour briser la glace et se faire des amis dans chaque nouvelle école. À un certain âge, dessiner des bolides et des femmes nues pour les autres garçons est devenu une merveilleuse forme de monnaie d'échange pour le "nouveau garçon".
Vers 10 ou 11 ans, le cinéma devient sa passion et il se met à attendre avec impatience les journaux du dimanche pour pouvoir découvrir et étudier les publicités des nouvelles productions. Après être allé au cinéma avec sa famille, il rentre chez lui et peint des scènes du film tirées de son imagination. Sa mère Rena a conservé un grand nombre de ces peintures de 20000 lieues sous les mers (1954), Les Vikings (1958), Spartacus (1960) et La machine à remonter le temps (1960). Déjà à l'époque, il avait le don de savoir raconter des histoires à travers ses peintures.
Lorsque la famille Alvin s'installe définitivement à Monterrey, en Californie, John fréquente la Pacific Grove High School et obtient son diplôme en 1966. Sa première expérience universitaire est un bref passage à l'université de Santa Cruz comme étudiant en médecine. Il dira que son échec est dû au fait qu'il était meilleur au billard qu'en chimie, mais en réalité le cœur n'y était pas. Il rentre à Pacific Grove et constitue un dossier de candidature pour l'Art Center College of Design de Los Angeles. Il commence par se spécialiser dans le design publicitaire, mais se tourne rapidement vers l'illustration. L'Art Center plonge John dans un environnement compétitif et sous haute pression. Malgré tout, il y a des étudiants qui arrivent au sommet et deviennent des stars. John Alvin est l'une de ces stars.
C'est à peu près à cette époque qu’Andrea, sa future épouse, entre en scène. John et elle sont présentés par un ami commun de l'Art Center et vont accrocher immédiatement. En effet, Andrea le trouve intelligent, drôle et très talentueux. Elle vient d'être diplômée de l'Art Center et travaille comme maquettiste d'animation dans une maison de production cinématographique, où elle crée des publicités télévisées animées. John a encore une année d'études à faire.
Ils se marient en 1971 et John obtient son diplôme la même année. À cette époque, la plupart des étudiants en illustration partaient immédiatement à New York pour se consacrer à l'illustration éditoriale et publicitaire. John ne veut pas faire ça. Il est installé et après avoir déménagé si souvent dans sa vie, il n'a vraiment pas envie de faire ce genre de changement majeur. Mais cela signifie rester à Los Angeles où il y a moins d'opportunités pour les illustrateurs.
Après l'obtention de son diplôme John se lance en freelance, mais les contrats sont rares, alors John et Andrea trouvent tous les deux un emploi dans le département de mise en page chez Hanna-Barbera. John y travaille pendant la journée et travaille la nuit, sur de nouvelles pièces de son portfolio. Lorsqu’ils découvrent une publicité pour un salon professionnel destiné à l'industrie de l'imprimerie appelant des illustrateurs à exposer leur travail, ils se disent qu'il n'y a pas grand-chose à perdre à essayer. John a pris quelques jours de congé de maladie chez Hanna-Barbera et est allé exposer son travail. Le hasard faisant parfois bien les choses, Anthony Goldschmidt un graphiste indépendant voit le travail de John et décide de l'engager pour illustrer une affiche pour la revue musicale Mary C. Brown and the Hollywood Sign, écrite par Dory Previn.
Il réalise quelques travaux supplémentaires avec Anthony Goldschmidt, puis celui-ci lui propose de réaliser une affiche pour le nouveau film de Mel Brooks, Blazing Saddles (1974). C'est un pari risqué, car ils ne sont pas engagés par le studio de Warner Bros. Ils feront le travail sur commande et ne seront partenaires sur le projet que si leur travail est utilisé. Si Anthony a ses entrées dans le studio, c’est surtout un excellent designer, quant à John c’est l’occasion pour lui de créer une œuvre étonnante. La réunion des deux, donnera naissance à une affiche des plus mémorables. C'est le début d'une incroyable collaboration créative qui durera de nombreuses années puisque le réalisateur ayant aimé son travail, sollicita de nouveau l’artiste pour Young Frankenstein (1974), Silent movie (1976), History of the World: Part 1 (1981) et Spaceballs (1987).
En 1979, Anthony Goldschmidt abandonne sa carrière de freelance pour ouvrir Intralink Film Graphic Design. Il s'agit de la première agence de marketing cinématographique à proposer à la fois des services audiovisuels et d'impression (affiches) sous un même toit. À l'époque, John ne voit pas de place pour lui dans une entreprise et se contente de rester freelance, même s'il travaille plutôt exclusivement pour cette société. Il est l'illustrateur de toutes les missions qui lui sont confiées et adapte son style et sa technique à chacune d'entre elles.
Ce n’est que plus tard, que John décide qu'un emploi stable avec un salaire et des avantages sociaux pourrait être une bonne idée et il demande donc à rejoindre le personnel d'Intralink. Le plus grand avantage dans ce déménagement, est qu'il va pouvoir travailler directement avec les studios de cinéma. Il gère des campagnes de la conception à la finition et apprend comment il doit travailler avec eux. De leur côté, les dirigeants des studios apprennent à connaître John et s'aperçoivent qu'il a des compétences bien supérieures à celles d'un illustrateur.
Lorsque les gens parlent de John Alvin, plusieurs mots reviennent constamment, gentil, chaleureux, drôle, intelligent et talentueux. Il est impossible de séparer l'homme de son art, car il travaille toujours à partir d'une forte émotion et cela se voit. Il est tellement plus qu'un simple illustrateur, il est capable de trouver une idée pour une affiche, de concevoir le logo et d'écrire le texte. Il adore trouver l'image qui évoquera l'élément du film qui attirera le spectateur et lui donnera envie de le voir. "Créer la promesse d'une grande expérience", voilà comment il décrit son travail.
John aime dire qu’il est un boy-scout loyal à l'excès. Cependant, à la fin des années 80, il estime que sa contribution à Intralink est bien plus importante que celle d'un simple salarié. Lorsqu’Anthony Goldschmidt lui répond qu’il n'est pas d'accord avec lui, John lui suggère qu'il est peut-être temps pour lui d’aller voir ailleurs. Anthony le laisse partir et c’est avec un grand soulagement que John quitte Intralink. La collaboration avait donné lieu à une œuvre phénoménale, mais il était temps pour John de voler de ses propres ailes. Il n'a pas de plans spécifiques. Il ne sait pas s'il sera accepté en tant qu'entité solo, il ne sait pas non plus s'il doit accepter un emploi ou s'associer à quelqu'un pour créer sa propre entreprise.
Après quelques jours de réflexion, la réponse est devenue évidente. Tom Martin, du marketing d'Universal, l’a appelé pour lui dire qu’il avait un travail pour lui, s’il voulait. Il s'agit du nouveau film de Spielberg, Always (1989). Ils ont besoin d'un illustrateur et comme John avait fait beaucoup d'affiches de Spielberg, il s’est retrouvé en haut de la liste. Après cela, les appels ont commencé à affluer pour d'autres travaux, certains pour des illustrations, d'autres pour une campagne complète. Andrea avait suivi une formation en design publicitaire à l'Art Center et avait accompagné John, en coulisses, sur de nombreux projets. C'était une évidence qu’ils devaient collaborer, alors ils se sont lancés et ont commencé à travailler ensemble.
Du jour au lendemain, le studio de design Alvin & Associates a pris forme. Ils ont acheté leur premier Mac et l'une des premières versions de Photoshop, car John pense que l'ordinateur est un outil comme un autre dans son arsenal. Leur studio ne cessera de changer, d'abord, en faisant de la place pour d'autres tables à dessin, puis en déplaçant des objets pour ajouter des ordinateurs. Si en tant que studio de design ils doivent produire des maquettes avec la typographie, ils doivent également s’occuper de mettre en place la facturation et surtout, quelle que soit leur taille, ils sont en concurrence avec tous les autres studios de la ville et doivent produire un travail de même qualité. De 1989 à 2002, ils travaillent sur de grands films pour Warner Bros., Disney et Universal, créant quelques-unes des affiches de films les plus emblématiques de cette époque.
La passion de John pour le cinéma est restée intacte à l'âge adulte. Il regarde ses films préférés encore et encore pendant qu'il travaille. John collectionne aussi les jouets et les maquettes, et il lui arrive souvent de construire un modèle pour le photographier comme référence pour une peinture. C’est un expert en modélisme et passe des heures à traquer les magasins de loisirs créatifs pendant son temps libre. Andrea finit par comprendre que la possession du modèle est aussi importante que sa construction et que le rayon des jouets StarWars de Toys "R" Us est peuplé d'hommes d'au moins quarante ans et plus. Les enfants ne sont pas admis.
Au cours des années 1990, le marketing cinématographique et le rôle du one-sheet changent. L'affiche n'est plus considérée comme le moyen le plus efficace d'atteindre le public. Au début de la carrière de John, des publicités utilisant ses illustrations clés apparaissaient dans des magazines comme People, Life et TV Guide, ainsi que sur des panneaux d'affichage et des affiches, mais les tendances se sont éloignées de la simple image au profit de solutions plus photographiques. Ils constatent que beaucoup de leurs meilleures idées sont rejetées et que, souvent, ils n’ont pas l'occasion de réaliser l'illustration finale. C'était comme manger les miettes sans pouvoir goûter le gâteau.
John adopte ce changement plus rapidement que d'autres artistes, produisant des œuvres emblématiques dans cette forme, parallèlement à son travail d'illustration. Son étonnante affiche pour Rain Main réussit, sous forme photographique, ce que font ses meilleures affiches de cinéma, capturer une idée, une émotion, une histoire, en une seule image.
Comme l'illustration n'est presque jamais utilisée dans les affiches d’aujourd'hui, beaucoup de personnes ne comprennent pas que les créations de John étaient en fait dessinées et peintes de sa main. En outre, la plupart de ses œuvres ont été créées dans l'anonymat et ne portent pas de signature, ou celles-ci ont été retirées par le studio et ne sont donc pas créditées. Il est temps de relier le nom de John Alvin à l'incroyable corpus d'œuvres qu'il a créées. Le monde doit savoir qu'un homme est à l'origine de tant d'affiches emblématiques qu'il admire et qui sont accrochées à ses murs.
Son œuvre, est plus vaste que celle de tout autre affichiste de cinéma et il est possible d’en découvrir une infime partie dans le livre The art of John Alvin, publié en 2014 par son épouse Andrea, chez Titan Books, qui désirait faire connaître le nom de l'homme dont les posters trônent sur les murs de tant de chambres.
John Alvin a remporté le grand prix du Hollywood Reporter Key Art Award pour son affiche E.T. : The Extra-Terrestrial. Cette affiche est également la seule œuvre d'art cinématographique à avoir reçu le Saturn Award de l'Academy of Science Fiction, Horror and Fantasy Films. Ses créations comptent parmi les œuvres d'art cinématographique les plus recherchées aujourd'hui, notamment l'affiche du dixième anniversaire de la Guerre des étoiles et les images emblématiques qu'il a conçues pour les séries Harry Potter, Le Seigneur des anneaux et Pirates des Caraïbes. Au total, il a créé les affiches de plus de 135 films et ses peintures originales, ses dessins et ses reproductions d'art en édition limitée sont exposés et collectionnés dans le monde entier. Depuis sa disparition soudaine le 6 février 2008 à Rhinebeck d'une crise cardiaque, John Alvin est reconnu comme l'un des plus grands concepteurs et créateurs de films de ces trente-cinq dernières années.

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